mercredi 18 mai 2011

The Tree of Life


Dans l'Amérique des années 50, l'équilibre d'une famille est remise en question par la mort d'un enfant. De la mère aimante au père autoritaire, chacun va devoir affronter son propre deuil.

Qu'il est difficile de décrire en quelques mots l'expérience que constitue Tree of Life... Œuvre d'une ambition démesurée tant par son exigence formelle que par la portée métaphysique de son propos, ce nouveau film de Terence Malick ne peut en tout cas laisser indifférent et ne manquera pas de diviser.

S'il est bien un point sur lequel Tree of Life ne peut souffrir aucun reproche, c'est bien sur ses qualités plastiques. Que les choses soient claires : nous tenons peut-être là le plus beau film que le cinéma nous ait jamais donné. Et les mots sont pesés. Chaque cadrage touche à la perfection, chaque plan irradie d'une lumière à la beauté irréelle. La caméra de Malick est littéralement touchée par la grâce, et cette exaltation absolue ne la quittera jamais pendant les deux heures et demie de cette miraculeuse expérience sensorielle.

Une perfection formelle d'autant plus vertigineuse que la narration est volontairement déstructurée, kaléidoscopique. Très économe en dialogues, Tree of Life utilise un langage cinématographique d'un genre nouveau, n'hésitant pas, en s'attardant sur le Big Bang et les débuts de la vie sur Terre (!), à créer de gigantesques mises en perspective. Une parenthèse qui constitue peut-être le moment le plus étourdissant du film, tant le réalisateur y fait une démonstration de virtuosité, donnant un souffle nouveau à une histoire que l'on pensait pourtant connaître par cœur.

Irréprochable sur la forme, Tree of Life peut toutefois rebuter sur le fond. Car tout le film est bâti autour de considérations métaphysico-religieuses auxquelles on ne peut prêter - et c'est là un doux euphémisme - qu'un intérêt relatif. Ce serait tout à fait supportable si Terence Malick n'adoptait pas une posture aussi radicale. Mais plus on avance dans Tree of Life, et plus on sent le film s'enfermer dans un mysticisme insistant, illustré par un symbolisme abscons qui n'arrange en rien le caractère un rien autiste de cette œuvre. L'ennui finit alors par pointer le bout de son nez et la dernière partie, entièrement faite de messages pour le moins lourds et redondants, paraît totalement interminable...

Verdict :
parce que Tree of Life est une inoubliable expérience sensorielle

parce que Tree of Life est aussi un traité mystique indigeste et ennuyeux

dimanche 15 mai 2011

Minuit à Paris


Un couple américain qui doit bientôt célébrer son mariage vient passer quelques jours à Paris. Un séjour qui va réserver son lot de surprises et entraîner une grande remise en question de notre fiancé...

Voilà un film qui aura su faire parler de lui. Car bien avant de faire l'ouverture du festival de Cannes, Minuit à Paris suscitait la curiosité des cinéphiles par la présence à l'affiche de Carla Bruni-Sarkozy. La véritable star du film n'est toutefois pas la première dame de France - elle ne bénéficie d'ailleurs que de quelques lignes de dialogue - mais bel et bien Paris, dont Woody Allen semble éperdument amoureux.

Une déclaration lancée dès le générique de début, où le réalisateur nous propose une collection de jolies cartes postales sur fond de musique jazz. Une vision idéalisée de la ville-lumière qui ne sera jamais reniée. Ses monuments, son histoire, sa vie culturelle : Paris est magique, et ce n'est pas pour nous déplaire. Le tableau est, bien sûr, trop idyllique pour être vraiment fidèle à la réalité. Mais il n'est jamais que le reflet de l'idée que se fait le héros de la capitale, berceau de la Vie de Bohème et inépuisable source d'inspiration. Est-ce un hasard si l'affiche représente Owen Wilson déambulant dans un Paris impressionniste ?

Il serait cependant inexact de réduire Minuit à Paris à une succession de vignettes touristiques, aussi agréables soient-elles. En montrant l'éternelle insatisfaction de l'Homme vis-à-vis de son époque, Woody Allen nous offre surtout une fable habile sur la nostalgie du passé. Le tout est lumineux, d'une grande légèreté et ne se départit jamais d'un humour rafraîchissant, égratignant au passage le conformisme d'une certaine bourgeoisie.

Il est bien délicat d'en dire plus sans gâcher en partie le plaisir que procure la découverte de ce film dont le scénario a le mérite de surprendre... mais qui pourra aussi agacer par son incorrigible posture bobo et sa tendance pathologique au name dropping culturel.

Verdict :

samedi 14 mai 2011

Source Code


Dans la série "les films que je vais voir bien après leur sortie"...

Encore un film où un gentil américain doit déjouer les plans d'un méchant terroriste qui projette de faire sauter Chicago à grands coups de bombe nucléaire (rien que ça). Sauf qu'ici, le moyen utilisé pour mener l'enquête est assez original : il consiste à envoyer un soldat dans les 8 dernières minutes de la mémoire d'une victime d'un précédent attentat pour essayer de retrouver l'identité du coupable.

Le résultat est un film plutôt ludique et malin, à cheval entre Inception et Un Jour sans Fin. Évidemment, c'est complètement invraisemblable, manichéen et pour ainsi dire pas d'une très grande subtilité. Mais il faut bien reconnaître que Source Code est un film terriblement efficace, qui remplit parfaitement son office de pop-corn movie du samedi soir.

Ce n'est déjà pas si mal, mais on ne peut s'empêcher de penser au grand film qu'il aurait pu être s'il avait creusé les thématiques morales qu'il se contente d'effleurer...

Verdict :

mercredi 11 mai 2011

Animal Kingdom


Après la mort de sa mère, Joshua part vivre chez sa tante dans la banlieue de Melbourne. Une famille qui vit exclusivement du crime et à laquelle il était jusque-là totalement étranger.

"Chaque truand finit par se faire prendre", nous dit la voix off dans les premières minutes du film. La couleur est annoncée. Animal Kingdom est un film noir où chaque personnage ne pourra échapper à la mécanique de son destin. A commencer par Joshua qui se retrouve rapidement confronté à un choix délicat : protéger sa famille et cautionner le crime ou collaborer avec la police et trahir les siens. Nous voilà en pleine tragédie grecque...

Clinique, brut et factuel, le style de David Michôd n'est pas sans rappeler celui de James Gray par son dépouillement et sa rage contenue. L'ombre de la mort semble planer sur chaque scène, pour, ponctuellement, frapper sans état d'âme : la violence est ici sourde, insondable et glaçante. Excellent dans ce registre du film de genre, Animal Kingdom cultive également un sens du suspense et de la tension qui en font un thriller imparable, au crescendo parfaitement maîtrisé.

Mais la principale force de cette œuvre est l'exceptionnelle qualité de son interprétation. James Frecheville incarne parfaitement un Joshua fuyant et insaisissable. On pourrait également citer tous les acteurs qui interprètent cette smala du crime, à commencer par Ben Mendehlson qui campe, avec le personnage de Pope, le malfrat le plus intimidant que l'on ait vu au cinéma depuis bien longtemps.

Verdict :

mercredi 4 mai 2011

Tomboy


A 10 ans, Laure est un véritable garçon manqué. Alors qu'au milieu de l'été, elle vient d'emménager dans une nouvelle ville, elle décide de se faire passer pour un garçon auprès de ses nouveaux amis.

Si l'enfance est un des thèmes privilégiés du septième art, son traitement par la question du trouble identitaire est bien moins fréquent. C'est la proposition que nous fait Céline Sciamma pour son deuxième long métrage, après le succès critique de sa Naissance des Pieuvres.

Le point de départ de cette histoire, à savoir le déménagement et la nécessité de s'intégrer dans un nouveau milieu, est classique, mais la réalisatrice en tire des développements intéressants et souvent inattendus. Car ce bouleversement originel va en engendrer bien d'autres, interrogeant par la même occasion notre propre conception de l'identité sexuelle : en assumant cette androgynie qu'elle aime à cultiver, Laure va délibérément se faire accepter en tant que garçon mais aussi connaître un premier émoi amoureux.

Pour filmer cette chronique estivale, Céline Sciamma fait le choix d'instaurer une grande proximité entre la caméra et ses personnages. L'essentiel du langage passe par le corps, et son expression est ici observée avec beaucoup de finesse et de sensibilité. Très vite, le spectateur devient le complice de Laure, l'accompagnant au gré des complications de cet éphémère jeu de rôle. Cet épisode n'est-il qu'une parenthèse ou la manifestation d'un trouble plus profond ? La question reste ouverte et, finalement, importe peu. Empreint d'une touchante innocence et filmé à hauteur d'enfant, Tomboy semble ne pas se soucier du lendemain.

Pour parvenir à un résultat probant, il fallait impérativement dénicher la perle rare en tant qu'actrice principale. C'est chose faite avec Zoé Héran, dont la prestation est magnétique et captivante de bout en bout. Une vraie révélation qui n'éclipse pas pour autant l'excellence de l'ensemble des enfants du film, et qui fait sans problème oublier le côté un peu trop appliqué de l'ensemble.

Verdict :