dimanche 31 janvier 2010

In The Air


Sa vie en l'air. Le métier de Ryan Bingham est de virer des gens aux quatre coins des Etats-Unis. Son quotidien, entre deux licenciements, ce sont les aéroports et les chambres d'hôtels au confort standardisé. Ryan se veut libre et indépendant, mais ses certitudes vont vaciller avec l'arrivée de deux femmes dans sa vie, qui vont révolutionner ses habitudes professionnelles et sentimentales.

Un générique pêchu, une séquence d'introduction réjouissante où le parcours de Ryan Bingham (George Clooney) dans un aéroport est filmé avec brio, une première scène de licenciement réussie... Jason Reitman sait appâter le chaland, et son nouveau film s'annonce, dans son premier quart d'heure, comme une comédie enlevée et corrosive. Malheureusement, passées les promesses de cette entrée en matière, In The Air s'assagit et rentre dans le rang des comédies romantiques sans saveur ni originalité.

Commençons par le plus évident : il manque à ce film un scénario digne de ce nom. Concrètement, il ne se passe rien, c'est mou, bavard, répétitif et ennuyeux. Pire encore, il se dessine au fil des scènes une morale plombante sur le mode "le travail, ça vaut quand même pas l'amour et la famille". Merci pour l'info. Il faut attendre les ultimes minutes pour qu'enfin, un rebondissement survienne, redonnant à In The Air les accents subversifs qu'on lui avait imaginés. Trop tard : au générique de fin, c'est avant tout l'ennui et la frustration qui dominent.

Les tentatives de Reitman pour nous arracher quelques sourires tombent, quant à elles, bien souvent à l'eau. Si on ajoute à cela une BO souvent niaise et sirupeuse, une réalisation paresseuse et une prestation de George "what else" Clooney fatigante à trop jouer sur la même corde, ça commence à faire beaucoup d'éléments à charge. On devine donc l'inéluctable conclusion : In The Air est proche de la catastrophe aérienne.

Verdict :

jeudi 28 janvier 2010

Océans


C'est quoi l'Océan ? En 1h40, Jacques Perrin tente d'apporter une réponse en nous entraînant à la découverte des fonds sous-marins.

Il nous refait le coup. Après avoir accompagné des volatiles divers et variés dans le Peuple Migrateur, Jacques Perrin s'intéresse aux crabes, tortues, baleines et autres bélougas.

Et une fois encore, le réalisateur, loin de se contenter d'un simple documentaire animalier version cinéma, fait preuve d'une certaine ambition. Car si Océans brille avant tout par ses images à couper le souffle, il recèle également de petites idées de mise en scène et de plans ingénieux qui font toute la différence.

Discret durant la première heure, le commentaire permet à la superbe partition de Bruno Coulais de s'exprimer pleinement. Il se fait ensuite plus présent pour délivrer un message écolo attendu, mais qui ne tombe jamais dans l'outrance moralisatrice ou alarmiste.

Le tout est peut-être un peu long, mais on ressort d'Océans subjugué et convaincu d'avoir vécu une expérience extraordinaire. Finalement, Jacques Perrin nous a encore bien eus...

Verdict :

dimanche 24 janvier 2010

Gainsbourg (vie héroïque)


De l'enfant juif Lucien Ginsburg au provocateur Gainsbarre, le parcours mouvementé, ponctué de conquêtes féminines, d'un monument de la chanson française.

Comme tout film du genre, Gainsbourg (vie héroïque) aurait pu être un biopic infiniment respectueux de son sujet, une œuvre classique et maîtrisée, mais figée et un brin ennuyeuse. Mais à la rigueur narrative et à l'exhaustivité documentaire, Joann Sfar préfère l'ellipse généreuse et la puissance de l'imaginaire. Assumant dès le générique son statut de transfuge de la BD, il s'affranchit avec une aisance confondante des codes habituels du biopic, pour nous amener à la découverte de la dimension la plus poétique de son personnage : Gainsbourg le génie, le séducteur, et le tourmenté.

Symbole de ce parti pris génial, La Gueule, double sombre et étrange du héros, s'impose comme un ressort dramatique essentiel. Déterminante à chaque fois qu'il est question pour Gainsbourg de forcer son destin, son ombre plane comme un pendant autodestructeur au génie de l'artiste. Et l'alchimie fonctionne à merveille. Exploitant une BO audacieuse (toutes les chansons ont été réarrangées et réinterprétées pour l'occasion) et qui évite avec bonheur l'écueil du best of, Joann Sfar navigue avec légèreté dans cet univers fait de chansons, d'amour, de rire et de larmes. Jusqu'à atteindre, au plus fort de ce tourbillon d'énergie créatrice, de véritables moments de grâce cinématographique : ici, une rencontre surréaliste avec Greco, là une apparition tarantinesque de BB... On lui pardonne donc volontiers la dernière demie-heure, moins percutante car plus en retenue.

Soulignons également la performance remarquable des acteurs, auxquels le film doit énormément. Elmosnino EST Gainsbourg dans le moindre geste, tout en gardant cette indispensable distance ironique. Les seconds rôles ne sont pas en reste, Laeitita Casta en tête : sa composition d'une Bardot fantasmée, toute en sensualité, touche à la perfection.

"Ce ne sont pas les vérités de Gainsbourg qui m'intéressent mais ses mensonges", assène le réalisateur à la toute fin du film, comme s'il avait redouté que le monde reste hermétique à ce Gainsbourg entre rêve et réalité. Qu'il se rassure, son film est plus que convaincant.

Verdict :

dimanche 17 janvier 2010

Invictus


Afrique du Sud, 1994. Alors que l'élection de Nelson Mandela marque la fin de l'apartheid, le peuple sud-africain reste profondément divisé. Le président décide alors de faire de la Coupe du monde de rugby le symbole de la réconciliation.

Pour sa livraison annuelle, le prolifique Clint Eastwood s'empare ici d'un sujet délicat. D'abord parce que traiter de l'histoire récente est toujours un exercice périlleux, plus encore lorsqu'il est question d'une icône de la stature de Mandela. Quand on sait en plus que le rugby est un sport totalement inconnu aux Etats-Unis, on se dit que le défi était relevé.

Trop peut-être ? Subissant le poids de l'Histoire, Invictus se contente en effet de suivre les sentiers balisés du film hollywoodien. Le résultat est un film convenu, débordant de bons sentiments et ne s'embarrassant pas de nuances. Bref, un film comme on en a déjà beaucoup vu et comme on en verra encore beaucoup. A quelques détails près cependant...

Car les scènes les plus chargées de symboles, autant dire les plus importantes du film, sont aussi les plus réussies. On pense notamment à cette séance d'initiation distillée par les Springboks à des enfants noirs des townships, ou à la visite par le capitaine François Pienaar de l'ancienne cellule de Nelson Mandela. Et si la frontière entre le symbole et le raccourci simpliste est ici ténue, l'émotion est bel et bien palpable. C'est bien là l'essentiel.

Côté interprétation, Morgan Freeman, complètement habité par le rôle de Mandela, crève littéralement l'écran. Mélange de force tranquille et d'humanité, il donne à son personnage la consistance dont on le crédite de manière quasi-inconsciente. Une performance remarquable, qui va éclipser jusqu'au très sympathique Matt Damon, et nous ferait presque oublier les lacunes dont souffre le film.

Remercions enfin Clint Eastwood d'avoir su porter à l'écran la ferveur des stades et l'intensité des matchs de rugby (malgré les engagements à cinq mètres...). Invictus, c'est aussi la réconciliation du sport et du cinéma.

Verdict :

dimanche 10 janvier 2010

Bright Star


Londres, au début du XIXème siècle. John Keats, jeune poète fauché et Fanny Brawne, sa voisine, tombent éperdument amoureux l'un de l'autre. Aussi puissante soit-elle, leur passion va buter sur d'innombrables obstacles.

Bright Star trouve sa plus grande force dans son esthétisme irréprochable. Le passage des saisons, la lumière et l'obscur, le frôlement des corps et le désir naissant, autant d'éléments qu'on a rarement filmés avec autant de justesse et de délicatesse. Cette réalisation minutieuse donne à l'ensemble une évanescente et contemplative élégance, qui résonne comme un bel écho à la poésie de John Keats.

Mais à trop vouloir mettre en valeur la beauté formelle de son œuvre, Jane Campion en oublie presque toute dimension émotionnelle. Lent, prévisible et embourbé dans son classicisme, Bright Star manque cruellement de souffle et d'amplitude, si bien que l'on ne parvient jamais à se sentir concerné par la passion inconditionnelle unissant John et Fanny. Pour un film traitant d'un sujet aussi universel que l'amour, c'est assez gênant...

Il faut donc tout le talent d'Abbie Cornish, parfaite dans son rôle d'amoureuse entre révolte et désespoir, et toute la beauté des vers de John Keats, agréables ponctuations de ces péripéties sentimentales, pour sauver Bright Star de l'ennui le plus total.

Verdict :