dimanche 24 janvier 2010

Gainsbourg (vie héroïque)


De l'enfant juif Lucien Ginsburg au provocateur Gainsbarre, le parcours mouvementé, ponctué de conquêtes féminines, d'un monument de la chanson française.

Comme tout film du genre, Gainsbourg (vie héroïque) aurait pu être un biopic infiniment respectueux de son sujet, une œuvre classique et maîtrisée, mais figée et un brin ennuyeuse. Mais à la rigueur narrative et à l'exhaustivité documentaire, Joann Sfar préfère l'ellipse généreuse et la puissance de l'imaginaire. Assumant dès le générique son statut de transfuge de la BD, il s'affranchit avec une aisance confondante des codes habituels du biopic, pour nous amener à la découverte de la dimension la plus poétique de son personnage : Gainsbourg le génie, le séducteur, et le tourmenté.

Symbole de ce parti pris génial, La Gueule, double sombre et étrange du héros, s'impose comme un ressort dramatique essentiel. Déterminante à chaque fois qu'il est question pour Gainsbourg de forcer son destin, son ombre plane comme un pendant autodestructeur au génie de l'artiste. Et l'alchimie fonctionne à merveille. Exploitant une BO audacieuse (toutes les chansons ont été réarrangées et réinterprétées pour l'occasion) et qui évite avec bonheur l'écueil du best of, Joann Sfar navigue avec légèreté dans cet univers fait de chansons, d'amour, de rire et de larmes. Jusqu'à atteindre, au plus fort de ce tourbillon d'énergie créatrice, de véritables moments de grâce cinématographique : ici, une rencontre surréaliste avec Greco, là une apparition tarantinesque de BB... On lui pardonne donc volontiers la dernière demie-heure, moins percutante car plus en retenue.

Soulignons également la performance remarquable des acteurs, auxquels le film doit énormément. Elmosnino EST Gainsbourg dans le moindre geste, tout en gardant cette indispensable distance ironique. Les seconds rôles ne sont pas en reste, Laeitita Casta en tête : sa composition d'une Bardot fantasmée, toute en sensualité, touche à la perfection.

"Ce ne sont pas les vérités de Gainsbourg qui m'intéressent mais ses mensonges", assène le réalisateur à la toute fin du film, comme s'il avait redouté que le monde reste hermétique à ce Gainsbourg entre rêve et réalité. Qu'il se rassure, son film est plus que convaincant.

Verdict :

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